C’est à Grasse, ville de la Côte d’Azur indissociable de l’histoire du parfum, que j’effectue cette initiation, proposée par la maison Fragonard.
Des générations de parfumeurs ont œuvré en ce lieu. Des maisons célèbres entretiennent ce magnifique savoir-faire. Outre Fragonard, Galimard et Molinard illustrent des décennies de mémoires olfactives, de créations mythiques, d’enivrantes senteurs.
Initiation à la création.
Nous voici dans l’atelier de création, face à 3 flacons d’accords composés sur le thème de la fleur de magnolia. S’y ajoutent un flacon vide pour le parfum final, des pipettes, des touches de senteur en papier, un petit pot gradué pour les essais et une feuille de route, pour créer 15 ml d’un parfum à notre goût.
Tout semble si simple…
- un peu d’agrumes ou de plantes aromatiques pour la note de tête et l’accroche du parfum que je vais créer,
- quelques fleurs et fruits pour la note de coeur et le thème de la fragrance,
- du bois, des racines, des écorces ou des épices pour la note de fond et pour fixer la senteur.
C’est parti pour jouer avec les compositions de base qui me sont attribuées et les mêler dans le bécher gradué jusqu’à obtenir l’assemblage qui m’emportera en voyage!
Je commence par trois parts égales :
- citrus et fleurs de vigne pour les notes de tête,
- fleur de frangipanier, magnolia et rose thé pour la texture crémeuse de la note de coeur,
- bois de santal, ambre blanc et musc pour les notes de fond.
Je dépose un peu du mélange sur une touche de senteur pour m’enivrer de mon mélange. Bon… C’est très moyen comme résultat… Trop de notes de tête et pas assez de fond…
A la recherche de la vibration olfactive.
Je poursuis mes mélanges.
Oui mais voilà ! Quand le citrus fait ce qui lui plaît et reste trop présent même quand on essaie de le faire disparaître, quand les notes de cœur ne font plus le poids face aux notes de fond alors même que j’en rajoute plus que je le souhaite, j’en suis dépitée.
Et je réalise que j’ai au moins raté une étape : imaginer mon parfum avant de le manifester en senteur. Un parfum ne se résume pas à un simple assemblage d’odeurs ! Il faut l’imaginer olfactivement.
L’imagination olfactive fait appel à la mémoire de l’odeur (et du goût) des émotions, des sensations, des paysages, des moments de vie. Mémoire qu’un “nez” sait traduire par des associations d’essences qui composent le parfum qui nous touche.
Car si l’olfaction semble un sens peu développé chez l’humain, voire très altéré par les pollutions et parasitages, il est en lien étroit avec la mémoire et les émotions. Une odeur agréable déclenche du plaisir, de la détente, du bien-être. Et inversement.
J’ai donc imaginé mon parfum, plus chargé en santal, ambre et musc, senteurs réconfortantes et rassurantes pour moi. Un parfum qui laisse oublier les citrus parce que plus agressifs que rafraîchissants à ce moment-là. Et juste une pointe supplémentaire de fleur de frangipanier, de magnolia et de rose thé pour éclairer l’obscurité des notes de fond.
Alors, soudain, une onde olfactive me parcours, une harmonisation physique se recrée, de la tête aux pieds, qu’une simple fragrance a su déclencher. Un moment éclatant d’extase, de pur bien-être.
